La ville collaborative
Ou comment se place le promoteur immobilier dans cette nouvelle manière de construire la ville.
Nous entrons dans « l’âge du faire » (Lallement, 2015), un postulat défendu par plusieurs auteurs éminents tels que Himanen (2001), Anderson (2012), et Rifkin (2012). Le mouvement des « makers », axé sur le bricolage, la fabrication et l’innovation, offre des opportunités uniques pour façonner notre société. Né de la convergence entre l’industrie informatique et la contre-culture libertaire des années 60, ce mouvement culturel et social influence désormais le fonctionnement, l’économie et la projection des territoires.
L’engouement pour les espaces dédiés à la création, tels que les coworkings, tiers lieux, hackerspaces, et fab labs, démontre la volonté de repenser les lieux de travail, de rencontre, de créativité, d’innovation, et de fabrication d’objets. Ces espaces, promouvant la coopération, émergent en marge des systèmes productifs et politiques traditionnels, suscitant des interprétations diverses quant à leur impact sur la société.
Face à cette culture collaborative basée sur le partage des savoirs, l’autonomie dans l’apprentissage, et l’innovation ouverte, les perceptions varient. Certains voient en elle le ferment d’une troisième révolution industrielle, d’autres perçoivent une sortie du capitalisme, tandis que certains soulignent un affaiblissement de la critique sociale et un nouveau front d’exploitation du travail.
Cette transformation culturelle et sociale remet en question les modèles de développement urbain établis au cours des dernières décennies. Les anciens modèles, tels que la « ville durable », la « ville créative » et la « ville intelligente », subissent une standardisation croissante, générant des récits préfabriqués et des actions collectives normalisées. Les revendications participatives émergent de toutes parts, obligeant à repenser ces modèles pour intégrer les valeurs communautaires, l’autonomie individuelle, et la valorisation des biens communs territoriaux.
En réaction à ces modèles établis, des alternatives telles que la « ville en transition », la « ville collaborative », et la « Fabcity » émergent, mettant l’accent sur l’éthique de la coopération, l’implication citoyenne, et la relocalisation des activités productives. Ces mouvements redéfinissent les priorités, mettant en avant des valeurs de partage, de coopération, et d’autonomie.
La culture numérique, au cœur de ces changements, transcende les frontières physiques et façonne de nouvelles formes de sociabilité. Les villes numériques, autrefois centrées sur la représentation virtuelle de l’espace, évoluent vers une optimisation des systèmes urbains grâce aux technologies de l’information et de la communication (TIC) et à l’exploitation des Big Data. Cependant, la révolution numérique ne supprime pas les contraintes spatiales, mais transforme la manière dont les interactions sociales se structurent au sein de l’espace urbain.
Les initiatives des « makerspaces », « hackerspaces », et autres lieux de créativité numérique représentent une nouvelle forme d’organisation territoriale des activités productives, concentrées principalement dans les métropoles. Ces initiatives reflètent un changement sociospatial et socioculturel, redéfinissant les façons de travailler, de concevoir, de décider, et d’agir.
Ce numéro thématique vise à explorer ces changements dans les sociétés urbaines et les cultures numériques, mettant à l’épreuve l’anatomie de la ville créative. Les articles abordent des initiatives locales, des dynamiques émergentes, et les implications territoriales de la culture numérique, offrant une perspective plus large sur l’évolution des modèles de développement urbain et la transition vers une société collaborative.
Encourager les initiatives locales, telles que les marchés de producteurs locaux, les ateliers de fabrication, et les espaces collaboratifs, doit devenir un élément clé du développement immobilier.
Les promoteurs immobiliers sont confrontés à l’opportunité passionnante de s’adapter aux principes novateurs de la Fabcity, axés sur l’autonomie, la relocalisation des activités productives et la collaboration communautaire.
Dans cette nouvelle approche, la co-conception des espaces devient essentielle, incitant les promoteurs à impliquer activement la communauté dans le processus de conception des quartiers. Cette démarche favorise la création d’environnements mieux adaptés aux besoins locaux, renforçant ainsi le sentiment d’appartenance et de participation.
La flexibilité dans l’utilisation des espaces constitue un autre aspect clé. Les promoteurs peuvent concevoir des bâtiments modulaires et adaptables, offrant ainsi une polyvalence nécessaire pour répondre aux diverses activités artisanales, créatives et collaboratives au fil du temps.
L’intégration des principes de durabilité est également au cœur de cette adaptation. Les promoteurs sont encouragés à adopter des technologies vertes, des solutions énergétiques autonomes et des pratiques de construction durables pour créer des quartiers respectueux de l’environnement.
Soutenir les initiatives locales devient une priorité, avec la création d’espaces dédiés aux marchés de producteurs locaux, aux ateliers de fabrication et aux espaces collaboratifs. Cela stimule l’économie locale tout en renforçant les liens sociaux.
La promotion de la coopération est un autre objectif clé. Les promoteurs peuvent intégrer des espaces de travail collaboratifs, des hubs d’innovation et des lieux favorisant l’échange de compétences, contribuant ainsi à la création d’une communauté active et dynamique.
L’aspect technologique est également crucial, avec l’intégration d’infrastructures numériques, de plateformes communautaires en ligne et d’outils technologiques pour renforcer la connectivité et la communication au sein de la communauté.
En adoptant une approche plus participative, les promoteurs peuvent écouter activement les besoins des résidents potentiels. Des forums communautaires, des enquêtes et des mécanismes de feedback peuvent être mis en place pour garantir une prise de décision inclusive.
En embrassant ces principes de la Fabcity, les promoteurs immobiliers contribuent à la création de quartiers plus durables, dynamiques et adaptés aux besoins spécifiques de la communauté. Cette approche favorise non seulement le développement immobilier mais aussi la création de véritables écosystèmes urbains centrés sur la collaboration et l’autonomie.
Comments are closed.